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Contes sympas

LE MARTIN-PÊCHEUR A MANGÉ MON POISSON ROUGE

LE MARTIN-PÊCHEUR A MANGÉ MON POISSON ROUGE

J’avais reçu Bobby le jour de mon anniversaire.
C’était un très joli poisson rouge, un cyprin doré.
Je lui avais procuré un bocal en verre.
Il nageait en rond et gonflait ses joues d’un air navré.

Comme il s’ennuyait dans cette petite superficie,
j’entrepris de lui faire prendre l’air au bord du lac.
De découvrir ses alentours et ses arbres fleuris.
Dans son récipient, il voguait en zigzag.

« Oh regarde », lui dis-je, une sauterelle vert olive.
Je la pris par la patte mais elle s’éclipsa.
Des oiseaux pépiaient, il s’agissait de grives.
La tranquillité berçait les mimosas.

C’était sans compter la présence d’un volatile affamé.
Je l’avais bien aperçu dans son peignoir moucheté turquoise.
Le corps court et trapu, le bec long et affiné.
Qui aurait cru qu’il confondrait Bobby avec une framboise ?

Soudain, il percuta la surface de l’eau
à la suite d’un fulgurant plongeon en flèche.
Là où la bouche de mon poisson rouge formait un O.
Et il s’en empara comme une canne à pêche.

Hébétée, je restai les yeux et la bouche grands ouverts.
Une colère blanche s’installa en moi, un cauchemar.
Je l’engueulai comme du poisson pourri d’un ton amer:
« Assassin, assassin , rends-moi mon poisson, tête de lard ! »

Mais rien n’y fit, Bobby n’était plus là.
Le pot transparent était inhabité.
Le martin-pêcheur l’avait choisi comme repas.
Et moi je suis rentrée toute déconcertée.