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Contes pour grandir

LE CRAYON GÉANT

LE CRAYON GÉANT

Dans une région au confins du Sahara
est un village où vit une tribu de crayons.
L’un d’entre eux n’est pas comme les autres. Il se nomme Mara
C’est un géant, plus impressionnant qu’un lion.

Mara fait fuir les autres à son passage.
Il est gigantesque et sa mine très pointue
Pourtant son cœur est un tout petit nuage
Tout doux, il a tellement d’amour à mettre à nu.

Un jour, tout triste il s’assied sur un rocher.
Comment changer? Longuement, il réfléchit:
« Que dois-je faire pour être heureux et accepté? »
C’est alors qu’une idée lui traverse l’esprit.

Mara décide de partir pour un lointain voyage.
Au-delà de toute galaxie. Au bout de l’univers.
Je trouverai une planète peuplée par des sages
Où l’acceptation de l’autre sera élémentaire.

La fusée décolle, Mara à son bord.
A travers le hublot il voit les étoiles.
Chacune d’elles constitue un trésor.
De petites ampoules qui clignotent sur la toile.

Il atterrit sur une planète pourpre.
Quelle étrange atmosphère se dit-il.
Le calme règne et la lumière m’empourpre.
A distance, il aperçoit quelque chose de mobile.

Un énorme coquillage avance tranquillement.
Bonjour lui dit-il. Je m’appelle Spire.
Qui es-tu ? Portes-tu un déguisement ?
Non je suis un crayon, tu me fais rire.

Je suis à la recherche de la clé du bonheur.
Celle qui fera de moi un crayon aimé.
Sur la terre, ma taille induit la peur.
Aurais-tu l’outil qui pourra me tailler ?

Si je repars petit, je serai comme les autres.
Ils ne fuiront alors plus à ma vue.
Spire lui prend la main. Tu es des nôtres !
Suis-moi et sois la bienvenue.

Mara visite son village, très étonné.
Mais vous êtes tous tellement différents.
Oui, lui dit Spire, ici rien n’est ordonné.
Chacun sa place, point de concurrent.

Tu trouveras des cônes, des tubes, des spirales.
A chacun sa fierté. Ils savent se rendre utile.
Certains construisent de belles cathédrales.
D’autres aident les moins agiles.

Ce que tu me dis me parle beaucoup.
Je crois comprendre comment faire pour être aimé.
Il est temps pour moi de repartir. Tout est moins flou.
Vite, les moteurs, je m’en vais les actionner.

Mara traverse à nouveau l’univers avec la même curiosité.
Le voyage est une aventure dont il se rappellera toujours.
La joie dans son cœur s’est installée.
Maintenant il pense à sa tribu, désireux d’être de retour.

Plusieurs semaines se sont passées depuis son arrivée.
Aujourd’hui, Mara est ami avec tous les crayons.
Il colorie le ciel au-dessus des regards émerveillés.
Tous l’aiment pour la joie qu’il procure dans l’action.

Quel plaisir de dessiner les nuages.
Voilà pourquoi je suis né grand.
Personne d’autre ne pouvait atteindre cet étage.
C’est le bonheur de prendre sa place et faire partie du clan.
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LE CHANTEUR DISTRAIT

LE CHANTEUR DISTRAIT

Au milieu de la scène, tous les regards se tournent vers lui.
Les musiciens l’attendent car il n’est pas prêt.
Une mouche vole autour du chanteur étourdi
qui observe la parade d’un air stupéfait.

Bzz… bzz… bzz… la mouche tourbillonne, voltige.
Bzz… bzz… bzz… elle a de gros yeux vert émeraude.
Bzz… bzz… bzz… plein de poils et donne le vertige.
Bzz… bzz… bzz… et une petite robe à la mode.

Ouououh… crie le public en attente du chanteur distrait.
Le groupe lui fait signe pour qu’il revienne sur terre.
Ouououh… les huées augmentent devant l’artiste niais.
Les joueurs s’inquiètent de cette pause passagère.

Le chanteur atterrit et entame le premier couplet.
L’audience se calme et écoute attentivement
les mélodies du jazz dans ce beau cabaret
et la jolie voix qui offre tout son talent.

Mais au premier refrain, le chanteur s’arrête à nouveau.
Un petit trou dans son pantalon attire son attention.
Avec le doigt, il investigue le vêtement en lambeaux,
chatouille la peau visible et rit des sensations.

Il relève les yeux et quitte la planète Mars.
Mais la salle est vide, il est seul, plus un chat.
Abasourdi, abandonné, il croit à une farce.
Mais il n’en est rien. La prochaine fois, il ne se dissipera pas.
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LE DRAGON SE RÉVEILLE

LE DRAGON SE RÉVEILLE

Quand je suis en colère, c’est plus fort que moi.
Je me transforme en dragon qui crache du feu,
qui brûle tout sur son passage, un orage qui foudroie.
Un monstre hideux qui hurle, qui jure, « Morbleu ! ».

J’écarquille les yeux sanguinolents
et avec un regard tuant, j’effraie l’agresseur.
Celui qui m’a provoqué, défié, le méchant.
Celui à qui maintenant, je fais peur.

Je suis à cran et m’abandonne au courroux.
À l’intérieur de moi tout est en ébullition.
Pour me calmer pourtant, il ne faut pas beaucoup,
un sourire, des excuses, un peu d’affection.

Alors, l’affreuse hydre devient toute petite
car il ne lui faut que peu d’amour pour disparaître.
Mon rival et moi nous nous réconcilions vite.
Apaisés et soulagés, notre amitié peut renaître.
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L’ORANGE FAIT DU TRAMPOLINE

L’ORANGE FAIT DU TRAMPOLINE

Une deux… une deux… la Banane s’entraîne pour la course.
Une deux… une deux… encore quelques enjambées.
L’Orange la voit et lève le pouce.
Bravo cher ami, je vois que vous persévérez.

Oui je pense être prêt pour les Jeux olympiques.
Et vous ? Quelle est votre discipline ?
Du neuf cette année. Point de saut à l’élastique
mais un sport plus surprenant : le trampoline.

Ha… Ha… Vous vous jouez de moi ?
Non, non, je suis sérieuse, un saut et triple salto.
Ma très chère, votre esprit divague.
Vos rondeurs ne vous mèneront pas très haut !

Sachez cher Monsieur que mes rondeurs, comme vous dites,
ne m’ont jamais freinée pour atteindre le sommet.
Mes performances sont une véritable réussite.
Laissez vos préjugés au vestiaire et faites vos lacets !

Et hop. En équilibre, l’Orange bondit pieds joints
au centre du trampoline telle une balle de tennis.
Elle effectue trois loopings dont la Banane est témoin.
Et avec un large sourire, elle termine ses exercices.
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LES CARABISTOUILLES

LES CARABISTOUILLES

Oh que c’est laid les carabistouilles !
Quand elles sortent de la bouche, je les regrette.
Quand j’en raconte, je reviens bredouille
car personne n’aime quand je dis des sornettes.

Oh qu’elles sont vilaines les carabistouilles !
Elles abîment les relations entre amis.
Quand je mens, j’ai l’air d’une andouille
et je casse la confiance qu’ils m’ont consentie.

Oh qu’elles m’agacent les carabistouilles !
Elles nous plongent dans un tourbillon
où la vérité d’une histoire se brouille,
où l’autre nage en pleine confusion.

Oh, je ne raconterai plus de carabistouilles !
Les balivernes me font sortir de mes gonds.
Quand j’en entends, j’ai la tête comme une citrouille.
Il faut être honnête pour que l’amour soit bon.

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LE PETIT CŒUR DONT IL MANQUAIT UNE MOITIÉ

LE PETIT CŒUR DONT IL MANQUAIT UNE MOITIÉ

C’était un petit cœur qui ne battait plus très fort.
Le chemin de la vie l’avait torturé.
Il avait construit autour de lui un château fort
et personne n’arrivait encore à le dompter.

Cela avait commencé quand tout petit,
il perdit des êtres proches auxquels il était attaché.
Deux petits bouts de ventricule gauche étaient partis.
C’est comme si un alligator l’avait croqué.

Plus tard, son petit chat avait disparu.
Cela le fendit et il éclata à nouveau.
Une bouchée de plus pour le crocodile aux dents pointues.
Une collection de larmes formant un ruisseau.

Un jour, il dut faire ses adieux à tous ses amis
Car il déménageait pour un autre village.
Depuis, il ne restait plus qu’une moitié affaiblie.
Pour la chauffer, il se cachait sous un gros lainage.

Son petit bout de nez coulait abondamment.
Il n’appréciait plus les fou-rire dans la rue.
Son regard visait le sol, il marchait clopin-clopant.
Tous ses deuils l’avaient désenchanté, il se croyait vaincu.

Et pourtant, le cœur est un organe puissant.
Il peut aller à la guerre et revenir balafré.
Il suffit de le nourrir d’amour pour qu’il redevienne grand.
Pour se battre robustement et se remuscler.

C’est ainsi que le petit cœur dont il manquait une moitié
rencontra un autre petit cœur brisé qui l’enflamma.
Cela lui remit du cœur au ventre pour se ranimer.
Il put alors à nouveau s’en donner à cœur joie.
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LE PETIT POLICIER DORT AU CARREFOUR

LE PETIT POLICIER DORT AU CARREFOUR

Les feux de signalisation ne fonctionnent plus.
Un petit policier règle la circulation.
Il est posté au milieu de quatre rues.
Un carrefour plein d’automobilistes et de piétons.

Pour arrêter les voitures, il lève le bras.
Comme quand je veux poser une question en classe.
Sa main fait deux petits tours de manivelle ou trois
pour que les véhicules avancent ou le dépassent.

Il est bien fatigué tout seul pour tout ce travail.
Dans la pollution et le bruit de la ville.
Ses paupières lourdes, il ne sent plus ses bras et baille.
Et s’étire comme un gros matou en clignant des cils.

Les voitures roulent dans tous les sens, les klaxons claironnent.
Bientôt le carrefour est encombré et le chaos s’installe.
«Tuut tuut » « Pouêt pouêt » « Dring dring », mais lui ronronne.
Couché sur le bitume, il entame une sieste dominicale.

Tout à coup un bruit énorme le sort de ses rêves.
« BOUM ! » c’est un monstrueux carambolage.
Un camion a perdu sa cargaison de ballons.
Plus de peur que de mal, mais quel embouteillage !

Aïe aïe aïe, le petit policier est bien embêté.
Comment va-t-il réparer cette erreur ?
Les milliers de balles rebondissent de tous côtés.
Hmmmm, que faire dans cette galère? pense-t-il songeur.

Je connais son angoisse car il vit dans ma tête.
C’est lui qui me dit : « Stop et réfléchis! »
Lorsqu’il s’endort, des tas d’ennuis me guettent
car alors je fais des bêtises et je suis puni.

C’est pourquoi je tente de le garder bien éveillé
pour qu’il me guide dans mes actions.
Ainsi, il m’aide à me concentrer
et préserve l’harmonie à l’école et à la maison.
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UN MONSIEUR BARBU DORT DANS LA RUE

UN MONSIEUR BARBU DORT DANS LA RUE

J’ai vu un Monsieur qui dort dans la rue.
Il était tout sale, très triste et gris.
Alors j’ai demandé pour héberger ce barbu.
Mais papa ne peut sauver tous les démunis.

Ce n’est vraiment pas juste, c’est un être humain.
Je sais mon cœur, c’est compliqué et horrible.
Le monde ne tourne pas rond et est parfois mesquin
et certaines situations restent inadmissibles.

Allons lui apporter de quoi goûter et une couverture.
Un grand sourire lui donnera un peu de chaleur.
Un mot doux réconforte dans les moments durs
mais je ne peux prendre la place du sauveur.

Les bases de la société doivent absolument changer.
Pour cela il faudrait éveiller tous les habitants.
Leur rappeler que si l’un souffre, nous allons tous y passer.
Et qu’il est temps d’investir dans un monde bienveillant.

Mais papa, nous avons de grands musées, plein de places,
des châteaux vides, des églises, des cathédrales.
Oui, mon poussin, tout cela est pour une autre classe,
celle à qui cela importe et gère le capital.

Si tu veux changer les choses, investis en toi.
Réussis ta vie, sois heureux, plein d’énergie.
Fais en sorte que tu participes aux choix.
Et surtout, garde tes valeurs et ton empathie.

Tu pourras alors changer ce qui peut être changé.
Agir là où tu peux agir et trouver des solutions.
Pour que chaque individu ait le droit d’exister
et que personne ne campe plus sur un paillasson.

Tout petit je rêvais d’une vie sans inégalité
où toute personne mangerait à sa faim quel que soit son parcours.
J’ai voulu changer ce qui est, mais n’y suis pas arrivé.
Ce qui importe est de continuer dans l’amour.

Car chaque action est une petite pierre à l’édifice.
Celui de la transformation, celle qui vise à nous unir,
à éradiquer la pauvreté et l’injustice.
Pour que certains d’entre nous arrêtent de souffrir.
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Contes pour grandir Poèmes pour enfants

L’AMOUR D’ALPHONSINE

L’AMOUR D’ALPHONSINE

Je connais une dame à la grosse poitrine.
Elle porte toujours des robes pleines de cœurs.
Elle rigole et s’appelle Alphonsine.
Sa peau lisse dégage une bonne odeur.

Je l’apprécie car elle est doucette.
Quand elle me dit bonjour elle me serre fort.
Dans sa poche elle cache des sucettes
qu’elle m’offre sans raison, je l’adore.

Je ne dois pas faire d’effort pour qu’elle m’aime.
Elle me dit que je suis son poussin
ou son lapin ou son chou à la crème.
Je crois qu’elle boit un peu trop de vin…

Elle m’explique les choses, celles que je ne comprends pas.
Je peux tout lui raconter, jamais elle ne me juge.
Même si j’ai commis une erreur, elle ne se fâche pas,
ni quand je suis méchant ni quand il y a du grabuge.

Alphonsine dit qu’elle a beaucoup vécu.
Alors, elle connaît bien l’être humain.
Elle chuchote qu’il est fragile et têtu,
et qu’il faut lui tendre la main.

« Souviens-toi que nous sommes tous petits,
nous ne sommes pas des Dieux » répète-t-elle sans cesse.
« Alors, pardonne la charogne, ma brebis,
éloigne-toi d’elle, c’est une âme en détresse ».

Grâce à elle je me sens exister.
J’ai l’impression d’être un roi puissant,
ou un preux et vaillant chevalier,
avec une armure invincible de gagnant.
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Textes poétiques

UN BONHEUR N’ARRIVE PAS SEUL(E)

UN BONHEUR N’ARRIVE PAS SEUL(E)

Chapitre 1 : L’ENFANT
Pf…pf…pf…quelques jours que ma mère a la tête à l’envers.
Pf…pf…pf…elle monte les escaliers accroupie sur une jambe puis sur l’autre.
vingt minutes pour monter les courses, ça me tape sur les nerfs.
Les sacs en mains, je la suis au cas où elle se vautre.

La la la la…une semaine que j’ai droit au récital.
La la la la…tous les matins, elle chantonne dans la salle de bains.
J’attends des heures, ce n’est vraiment pas normal.
pour modeler ma huppe et ressembler à Tintin.

Hi hi hi…elle rit comme une hyène à longueur de journée.
Ha ha ha…heureuse, le sourire scotché sur son visage.
Je ne comprends pas où sont les cris, ma maman énervée ?
Son stress quotidien aurait-il fait naufrage ?

Dix années en équipe à la voir peiner
Combattre pour survivre.
Mère solo, survivante, parent isolé
qui dirige un bateau ivre.

Nombres de pleurs, de cris, de moments de désespoir.
Jetée à la mer sans bouée de sauvetage.
Elle se réveillait toujours épuisée, broyant du noir.
Le moindre faux-pas et c’était l’abordage.

Travailler, trimer, nettoyer, faire les commissions.
Cuisiner, bricoler, gérer le budget.
Me conduire, me chercher, préparer mes collations.
S’occuper des devoirs, lire les histoires, sans aucun relais.

Les pipis, les cacas, les biberons, les vomis.
Les crises d’asthme, les retenues, les réunions d’école.
Les colères, les chagrins, les pleurs la nuit.
Elle s’est tout coltiné et en a souvent eu ras-le-bol.

Isolée dans une société où chacun vit pour soi.
Manquant de liquide pour s’autoriser une sortie.
Ce fameux trou financier qui l’empêche d’inviter qui que ce soit.
Pas de joie pour les anniversaires car le cadeau est hors de prix.

Je l’ai vue vieillir et souffrir seule pendant dix ans.
Je l’ai entendue sangloter et prier au crépuscule.
Une vie à l’arrêt, déshumanisée seule avec son enfant.
Mon papa nous a abandonnés C’est archi nul !

Et moi, j’en ai bavé. Moi, je l’aime ma mamounette.
J’ai accepté qu’elle me bouscule, qu’elle me hurle dessus.
Je suis devenu un pitre pour qu’elle soit en goguette.
Pour la voir rire et oublier une existence biscornue.

J’aurais aimé que les gens viennent la soutenir.
Les parents d’école, les voisins, les médecins.
Que quelqu’un se soucie d’elle et vienne la secourir.
Lui trouve une échappatoire et lui tienne la main.

Dix années en équipe à la voir peiner
Combattre pour survivre.
Mère solo, survivante, parent isolé
qui dirige un bateau ivre.

Sauf que depuis une semaine, sept jours exactement.
Mamounette n’est plus fatiguée. Son regard se colore.
Le matin, elle se lève du bon pied en chantonnant.
Plus puissante et fière que Nabuchodonosor.

Les chaussettes traînent partout mais elle ne dit rien.
Les mots pleuvent dans le journal de classe, elle les signe.
J’oublie mes devoirs, elle me dit juste « ce n’est pas bien ».
Je regarde la télé pendant des heures sans qu’elle ne cligne.

Sauf que depuis une semaine, depuis sa rencontre avec Paul.
Depuis sept jours exactement, elle se transforme en oiseau.
Elle ouvre ses ailes, très grand, respire profondément et décolle.
Elle saute du lit, joyeuse, m’embrasse et me serre le cœur tout chaud.

Je remercie le ciel d’avoir mis ce monsieur sur son chemin.
Elle était trop seule mamounette, superwoman c’était trop.
Et j’espère qu’il l’accompagnera longtemps car il lui fait du bien.
Je souffle depuis et peux enlever mon costume de Pierrot.

Je la vois heureuse pour la première fois.
Elle est belle et je l’aime de tout mon cœur.
Le bonheur n’arrive pas seule, croyez-moi.
J’en sais quelque chose, sa solitude m’a fait peur.

Dix années en équipe à la voir peiner
Combattre pour survivre.
Mère solo, survivante, parent isolé
qui dirige un bateau ivre.

Chapitre 2 : LA MÈRE
…Silence…plus d’asthme, plus de crise, plus de mensonge.
…Silence…il est tout calme mon petit loup.
Comme un grand, dans ses bouquins il se plonge.
Il range et respecte les limites tout à coup.

…Silence…que se passe-t-il ? C’est le miracle !
…Silence …pas d’engueulade, du calme à la maison.
Et moi, je le porte sur le pinacle.
C’est rare que je ne le gronde pas mon rejeton.

…Silence…il me suit dans l’escalier, un caneton collé à sa mère.
…Silence…c’est la première fois que je ne dois pas le chercher,
qu’il ne disparaît pas comme un courant d’air.
Le prodige serait-il enfin arrivé ?

Dix années de galère à l’élever seule.
Courir pour avancer.
Coupée de mon essence comme une gerbe de glaïeuls.
En mode survie et s’accrocher.

Accoucher seule, rentrer seule, le bébé sous le bras,
mystérieusement dans un monde sans sommeil,
où l’angoisse envahit l’air, elle prend le pas,
et me garde éternellement en mode veille.

Des années de nuits blanches.
Des années d’inquiétude.
Et pourtant, je l’aime mon ange,
Il m’a juste rendu la vie rude.

Pas de sous, pas de soutien.
J’ai plongé dans l’isolement.
Le mode survie m’a pris la main.
Et j’ai craqué tout doucement.

Moi qui rêvais d’être parent, j’ai découvert un gouffre.
J’ai heurté un monde égoïste et sans cœur.
Dans lequel il est normal qu’une maman souffre.
Où chacun savoure son propre bonheur.

J’ai crié au secours, je me suis battue.
J’ai travaillé, trimé, j’ai pris sur moi.
Mon enfant en premier sans que je ne me situe.
Survivre, trouver de quoi manger pour les repas.

Dix années de galère à l’élever seule.
Courir pour avancer.
Coupée de mon essence comme une gerbe de glaïeuls.
En mode survie et s’accrocher.

Je lui ai hurlé dessus.
Ma souffrance déteignait sur lui.
J’aurais aimé lui épargner cette déconvenue,
n’être que douce, bienveillante, un appui.

Tous ces moments de détresse.
Tous ces moments de désespoir.
Epuisée, isolée, dans une vie qui nous oppresse,
sont malheureusement gravés dans notre histoire.

Il aurait suffit d’un peu de soutien.
Un peu de présence, de compassion.
Une main tendue, un câlin.
Pour éviter la déshumanisation.

Sauf que depuis une semaine, depuis ma rencontre avec Paul.
Depuis sept jours exactement, la vie prend un autre goût.
Je respire, j’éprouve, je m’envole.
Son regard sur moi ouvre tous les verrous.

J’avais oublié que j’étais une femme.
J’avais oublié que je pouvais exister.
J’avais oublié que j’étais une dame.
J’avais oublié ce que c’était d’être touchée.

Sauf que depuis une semaine, sept jours exactement.
Je retrouve le sommeil, je chantonne.
Je ne suis plus que maman.
Mon âme heureuse s’abandonne.

Je me sens heureuse pour la première fois.
Depuis dix ans, depuis mon enfant.
Le bonheur n’arrive pas seule, croyez-moi.
J’en sais quelque chose, ma solitude m’a mise au banc.

Des années de galère à l’élever seule.
Courir pour avancer.
Coupée de mon essence comme une gerbe de glaïeuls.
En mode survie et s’accrocher.

Chapitre 3 : L’HOMME

Waouw…quelle énergie, je bondis !
Waouw…la claque, le coup de foudre !
Quelle femme ! Je suis ébloui.
Elle m’explose comme de la poudre.

Pas de bimbo, pas de petite fille.
Elle a du cran, de la poigne !
Point d’image, point de supercherie.
Une vraie dame qui se soigne.

Son petit, un chouette gamin.
Quelle maturité, quelle soif de vivre.
J’aimerais le prendre par la main.
Le sortir de son bateau ivre.

A l’aube de mes cinquante ans.
Un nouveau chapitre s’ouvre-t-il ?
Mes enfants devenus grands.
Moi qui pensais partir au Brésil…

Je me décide, je me lance, mon cœur me dit « vas-y ».
J’avais oublié que l’amour était puissant.
Je tente l’expérience, je la choisis et lui dit « oui ».
Je veux donner à nouveau une chance à l’attachement.

Un bonheur n’arrive pas seul.
Aujourd’hui, je le sais.
Je le vois d’un bon œil.
Quelle joie, je voudrais l’aimer.